Julien Wosnitza a milité dans l’association de protection des baleines Sea Shepherd. Il a ensuite cofondé l’association Wings of the ocean, qui contribue à la dépollution des océans et du littoral. Il est l’auteur d’un bref essai intitulé « Pourquoi tout va s’effondrer ».
1) Bonjour Julien, tu as publié « Pourquoi tout va s’effondrer » il y a 3 ans. Depuis, quelle évolution vois-tu ?
Je vois beaucoup d’évolutions, mais aucune dans le bon sens. Franchement, je pensais qu’il y aurait une prise de conscience de la fragilité de nos civilisations avec le Covid. Pourtant, dès le pic de la crise passé, l’économie (et avec elle les émissions de CO2) est repartie de plus belle. On perpétue un système que nous savons destructeur.
2) Par quoi faudrait-il commencer, selon toi, pour limiter la crise écologique ?
Il n’est jamais trop tard pour essayer de préserver ce qui reste de vie sur Terre. La 1ère chose selon moi est de préserver la biodiversité. Pour cela, il faudrait interdire l’artificialisation des sols et surtout passer à un mode d’alimentation végétal. Après, il faudrait agir partout et sur tout en même temps, ce qui est malheureusement très complexe.
Le Kraken, un trois-mâts, de l’association Wings of the Ocean
3) Ton association essaie de dépolluer des océans, notamment grâce à une incroyable bateau, le Kraken.
Quelle est la situation actuelle des océans en matière de pollution et de biodiversité ?
Le plastique déjà présent dans les océans y restera. Nous n’irons pas le chercher car cela demanderait une énergie considérable, ce qui ferait au final plus de mal que de bien. Ce qui est possible, en revanche, c’est faire en sorte que moins de plastique s’y déverse désormais.
Pour ce qui est de la biodiversité océanique, elle est à l’agonie. La pêche (dans sa globalité, pas seulement les énormes navires usines, je prends les petits pêcheurs artisanaux avec) a complètement détruit les écosystèmes et a fortement réduit les population de certaines espèces. La situation est dramatique. Pour y remédier, je ne vois qu’une solution : interdire la pêche partout où elle n’est pas une nécessité de subsistance alimentaire.
Canettes, bouteilles, résidus de matériel de pêche… Les déchets sont nombreux
4) Tu as essayé de nouer des partenariats avec de grandes entreprises et échangé avec de nombreux responsables d’entreprises.
Penses-tu que le changement se fera avec les multinationales ou contre elles ?
J’échange beaucoup avec des chefs d’entreprise, effectivement. Aujourd’hui, malgré une prise de conscience assez manifeste sur le besoin de s’engager au niveau écologique, nous n’avons pas encore la même définition de ce qu’est l’engagement. Selon moi les entreprises devraient faire le maximum, quitte à transformer leur activité. Les entreprises sont cependant souvent adeptes des petits pas, ce qui n’est pas du tout à la hauteur des enjeux. Je ne connais pas de chef d’entreprise qui soit prêt à remettre en cause l’activité de son entreprise pour des raisons écologiques. Encore moins pour les multinationales.
5) Tu participes au livre « Générations », dans lequel onze jeunes racontent comment ils essaient de changer les choses pour éviter le crash écologique.
Qu’est-ce qui selon toi différencie la jeunesse des générations précédentes ?
Je pense que la différence fondamentale vient du fait qu’une partie de notre génération a pris conscience que les effets de l’effondrement seront pour nous. On va se prendre de plein fouet ses effets de notre vivant, à des âges où nous serons en charge. La pression est énorme ! Notre génération n’a pas les rênes du pouvoir aujourd’hui, mais nous ressentons dans notre chair le fait que les décisions actuelles vont impacter notre futur.
Merci Julien !
Crédit photos : Wings of the ocean, Julien Wosnitza